la maladie des os de verre
est une maladie génétique se traduisant par une anomalie de la production du collagène et de la matrice de l'os. Elle aboutit à une fragilité osseuse extrême dès l'enfance, et conduit à des déformations possibles du thorax et des membres.
Cette pathologie est rare et méconnue. Le nombre de personnes concernées est difficile à estimer car il n'y a pas d'étude épidémiologique précise faite en France.
On estime cependant qu'en France entre 3 000 et 4000 personnes vivent avec une ostéogenèse imparfaite.
Le collagène est la principale protéine fibreuse de l'organisme, qui donne la souplesse aux tissus. Parmi les 21 types de collagènes connus, c'est le collagène 1 qui est en cause dans l'immense majorité des cas.
Les progrès récents dans la connaissance de l'ostéogenèse imparfaite concernent aussi bien sa diversité clinique que biochimique.
On distingue schématiquement 4 types d'ostéogenèse imparfaite (classification de Silence) en fonction des mutations génétiques concernant la synthèse du collagène (gène COL1A1 pour la chaîne alpha du collagène de type 1 sur le chromosome 17, gène COLIA2 pour la chaîne béta sur le chromosome 7) :
- type I : le plus fréquent représentant 80% des cas d'ostéogenèse imparfaite. Transmission héréditaire sur le mode autosomique dominant. Formes modérées avec sclérotiques bleues. Fréquence : 1/30 000 naissances vivantes.
D'autres mutations géniques moins fréquentes existent. Edwards et Graham ont montré en 1989 qu'il était possible pour un enfant de présenter une ostéogenèse imparfaite sans aucun antécédent familial du fait de nouvelles mutations génétiques. Une anomalie génétique peut apparaître et amener à ce qu'une famille, à priori non "à risque", ait un enfant atteint.
Près de la moitié des cas sont dus à une néo-mutation.
Sur le plan biochimique, les anomalies du collagène peuvent être trouvées dans 85% des cas d'ostéogenèse imparfaite. La culture de fibroblastes (biopsie de peau) peut donc aider lorsque le diagnostic n'est pas évident. L'interprétation des résultats n'est pas toujours simple car même si la plupart des patients avec une ostéogenèse imparfaite montrent des anomalies dans le collagène, une synthèse normale de collagène par les fibroblastes de la peau n'exclut pas le diagnostic d'ostéogenèse imparfaite.
L'utilité de ce genre d'examen biochimique a été mise en évidence par Gahagan et Rimsza qui ont décrit 3 enfants âgés de 12 mois, 16 mois et 9 ans, initialement considérés comme enfants battus et qui portaient des mutations génétiques concernant la synthèse du collagène.
Quels sont les symptômes ?
L'ostéogenèse imparfaite se présente sous des formes de gravité très différente.
Le signe le plus connu est la survenue de fractures multiples sans traumatisme majeur. Ainsi s'explique le terme de "maladie des os de verre" antérieurement utilisé.
Des lésions vertébrales sont extrêmement fréquentes, souvent sous-estimées car n'entraînant pas toujours une scoliose mais expliquant les douleurs dorso-lombaires décrites par plus de 75% des patients.
Des dents grisâtres et fragiles sont observées dans 30% des cas et justifient un traitement spécialisé pour éviter une usure prématurée des dents.
Une surdité, plus ou moins sévère, peut apparaître à l'âge adulte.
D'autres aspects de l'ostéogenèse imparfaite sont de fréquence mal connue : l'atteinte cardiaque, l'impression basilaire...
Dans la classification de Silence :
est typique avec des antécédents familiaux, des sclérotiques bleues, une surdité parfois précoce (40% des cas), des anomalies dentaires, un retard statural (-2 à 3 DS), une hyperlaxité ligamentaire et une facilité à faire des hématomes cutanés. Si l'examen clinique et l'interrogatoire des familles sont bien conduits, le diagnostic est relativement facile même si durant la petite enfance, les radiographies peuvent être normales et s'il y a toujours une possibilité de nouvelle mutation génétique expliquant dans certains cas l'absence d'antécédent familial.
se traduit par une mort précoce.
est progressive et se manifeste, après la première année, par des déformations bizarres, une scoliose, une modification de couleur de la sclérotique qui s'estompe avec l'âge, une petite taille et une instabilité psychomotrice. Le diagnostic n'est parfois porté que lorsque la coloration anormale des dents devient évidente.
est plus fréquent qu'on ne le croyait jusque là, et c'est celui qui pose le plus souvent des difficultés de diagnostic. Les sclérotiques sont normales, il n'y a pas obligatoirement d'antécédents familiaux et les radiographies lors des premières années de la vie peuvent être normales.
Comment faire le diagnostic ?
Pour la plupart des enfants, le diagnostic d'ostéogenèse imparfaite est évident dans les formes complètes, mais ne l'est pas quand le tableau clinique est très incomplet.
De nombreux patients présentent des formes cliniques modestes avec peu ou même aucun symptôme clinique. Des patients atteints de la maladie peuvent avoir une enfance indemne de toutes fractures reconnues.
Les sclérotiques bleues sont très utiles pour le diagnostic, et il n'est donc pas surprenant que les patients présentant une ostéogenèse imparfaite de type IV avec sclérotiques normales ne soient pas reconnus.
Dans beaucoup de cas où le diagnostic est difficile, l'enfant est trop jeune pour avoir des dents alors que les anomalies dentaires aideraient le diagnostic. Un auteur a publié en 1993 le cas d'un enfant hospitalisé pour des fractures multiples et dont les parents ont été emprisonnés pour sévices. Ils n'ont été innocentés que lors de l'éruption des dents anormales qui ont permis d'établir le diagnostic d'ostéogenèse imparfaite de type IVB.
Une hyperlaxité ligamentaire, une fragilité cutanée, une régulation thermique défectueuse sont des anomalies qu'il est difficile d'objectiver chez le jeune enfant. Une scoliose progressive est une complication fréquente mais tardive et se voit surtout dans l'ostéogenèse imparfaite de type III dont le diagnostic est en règle aisé. Des troubles de l'audition sont également de survenue tardive (vers 30 ans) et n'existent guère à un moment où le diagnostic est difficile.
Sur le plan radiologique, l'ostéogenèse imparfaite est classée dans le cadre plus général des ostéochondrodysplasies. Elle peut se présenter sous forme d'une ostéoporose avant que le diagnostic n'en soit porté de façon certaine.
L'étude de l'ostéodensitométrie (densité osseuse) est un élément objectif essentiel du suivi évolutif de l'ostéogenèse imparfaite. Chez l'enfant, il nécessite l'utilisation d'un appareil disposant d'abaques adaptées (Hologic).
La radiographie de crâne fournit des images très caractéristiques mais non spécifiques : les os wormiens.
Le bassin peut être déformé comme celui d'autres maladies osseuses constitutionnelles.
Une déformation du thorax en carène peut être observée.
La majorité des ostéogenèses imparfaites sont en rapport avec une mutation affectant le collagène 1. La séquence des acides nucléiques des exons du COL 1 A 1 et du COL 1 A 2 étant connue, un diagnostic prénatal est donc réalisable chez les personnes "à risque" qui le souhaitent.
Peuvent être considérés comme "à risque" de transmission de l'ostéogenèse imparfaite les couples entrant dans l'un des groupes suivants:
1) Un des deux (voire les deux) membres du couple est (sont) atteint(s) d'une ostéogenèse imparfaite.
2) Couple, sans antécédent familial, ayant déjà eu un enfant atteint d'ostéogenèse imparfaite et souhaitant avoir d'autres enfants : le mosaïcisme dans l'ostéogenèse imparfaite est fréquent.
3) Un des ascendants ou membre de la fratrie de l'un des membres du couple est atteint d'ostéogenèse imparfaite. La variabilité des formes dans certaines familles peut expliquer qu'une forme moins sévère d'ostéogenèse imparfaite chez l'un des membres peut amener à ignorer le diagnostic et à parler, à tort, secondairement de résurgence.
La lourdeur de l'examen en biologie moléculaire préalable nécessaire, donc la longueur de sa réalisation comme son coût, pour déterminer le siège de la mutation explique que celui-ci doive impérativement être réalisé avant le début de la grossesse. Si cette étape préalable a été respectée, le diagnostic prénatal pendant la grossesse demandera de 48 heures à 8 jours.
La base de données mondiale, référençant toutes les mutations du collagène 1 publiées, est tenue par Raymond Dalgleish à l'université de Cardiff (GB) .
L'étude de l'ADN foetal obtenu par biopsie de villosités choriales s'avère l'examen le plus sensible et le plus spécifique: le diagnostic est ainsi obtenu entre la 10ème et la 12ème semaine de grossesse.
Le diagnostic échographique est toujours tardif pour les formes de type IV. Le taux de faux négatifs n'est pas évalué et limite son intérêt.
L'ostéogenèse imparfaite est une des causes de retard de croissance intra utérin qui peut être diagnostiquée par la surveillance échographique de la grossesse, mais de manière tardive (20ème semaine).
Comment faire le diagnostic différentiel avec le syndrome des enfants battus ?
C'est la question centrale de cette maladie.
Le diagnostic entre ostéogenèse imparfaite (et pathologies similaires) et le syndrome des enfants battus peut être extrêmement difficile. C'est un sujet dont la teneur affective et sentimentale est immense puisque c'est le sort d'un enfant et d'une famille qui en dépend.
Il est tout aussi préjudiciable de porter à tort un diagnostic d'ostéogenèse imparfaite et de remettre un enfant martyrisé à ses parents tortionnaires que de séparer un enfant fragile d'une famille normale, provoquant une catastrophe humaine, affective, psychologique et sociale.
Ce thème a été l'objet de très vives controverses parmi les experts notamment aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne.
Colin R.Paterson et MacAllion (Biochimie Médicale, Dundee, Ecosse) ont publié en 1989 leur expérience des erreurs de diagnostic concernant des pseudo enfants battus qui ont vu plus tard le diagnostic d'ostéogenèse imparfaite enfin porté. Sur 802 cas d'ostéogenèse imparfaite, les difficultés de diagnostic ont été soulevées 111 fois. Sur ces 111 cas, 15 ont connus des suites judiciaires.
Parmi ces 15 cas, un certain nombre n'aurait pas dû donner lieu à erreur. Certains avaient une histoire familiale très claire mais qui n'avait pas été reconnue, d'autres avaient des sclérotiques anormales ou un nombre excessif d'os Wormiens ou encore une dentition anormale. Cependant, dans certains cas le diagnostic était en réalité très difficile lors des premières factures car aucun des autres signes typiques d'ostéogenèse imparfaite n'étaient présents. Dans le pire des cas, un enfant a été placé en institution et enlevé à l'affection de ses parents pendant 3 ans et demi et quasiment adopté avant que de nouvelles fractures ne fassent enfin porter le diagnostic. Lors des premières fractures, la densité osseuse, les dents et les sclérotiques étaient normales; il n'y avait pas d'antécédent familial et la seule petite anomalie était un excès d'os wormiens.
Plusieurs articles ont été publiés notamment dans la Revue Américaine de Génétique Médicale en 1995 où différents spécialistes ont débattu des difficultés d'établir le diagnostic différentiel à partir des clichés radiologiques. Ce problème est suffisamment important pour qu'une Fondation pour l'étude de l'ostéogenèse imparfaite ait été créée en Californie (Etats-unis).
Le Pr. Paterson publie en 1993 les cas de 39 patients âgés de moins de 1 an présentant des fractures inexpliquées. Fractures des côtes, anomalies métaphysaires et réactions périostées étaient la règle. Le diagnostic initial était celui d'ostéogenèse imparfaite lorsque les fractures étaient survenues en milieu hospitalier et d'"enfant battu" quand elles étaient arrivées à la maison. D'autres anomalies étaient parfois notées chez ces patients : anémie, vomissements, gros foie, grosse rate, dyspnée. Lorsque c'était le cas, ce syndrome présentait des similitudes troublantes avec la déficience congénitale en cuivre, notamment chez les prématurés et les jumeaux.
Paterson et ses collègues suggèrent que la cause de ce syndrome qu'ils ont appelé : "l'os temporairement fragile" (temporary brittle bone disease) est une déficience temporaire en une enzyme, peut-être un métaloenzyme, intervenant dans la synthèse du collagène. Si la réalité clinique de ce syndrome est acceptée par de nombreux auteurs, son mécanisme exact reste controversé.
Pour 7 de ces patients, le diagnostic initial était celui d'ostéogenèse imparfaite, en général parce que les premières fractures étaient survenues à l'hôpital. Dans ces cas, les parents étaient informés du diagnostic et des précautions à prendre. Pour les 32 autres cas, les fractures étaient survenues à domicile et avaient fait poser à tort le diagnostic d'enfants battus. Cependant, ces cas étaient remarquables car les multiples fractures avaient eu lieu sans trace de traumatisme et plus de 90% de ces fractures avaient été découvertes lors de radiographies fortuites effectuées pour de toutes autres raisons. Dans tous ces cas, il y avait un énorme contraste entre l'évidence radiologique d'une fracture post-traumatique et l'absence de lésion cutanée superficielle aux yeux des professionnels et des personnes étrangères à la famille qui avaient pu voir les enfants à la date présumée des accidents.
Le type de fractures et les éventuels symptômes associés étaient identiques quel que soit le diagnostic initial : ostéogenèse imparfaite ou syndrome de Silverman. Les fractures de côtes sont communes, les anomalies métaphysaires sont communes, les réactions périostées sont communes et sont parfois même presque symétriques.
À la Conférence Internationale de l'ostéogénèse imparfaite qui s'est tenue à Montréal en 1999, le Professeur David Prockop (Etats-unis) faisait remarquer que sur 25 cas de maltraitance qu'on lui avait demandé d'étudier, 2 se sont avérés être atteints d'ostéogenèse imparfaite.
Un enfant souffrant d'ostéogenèse imparfaite peut très bien avoir un examen clinique parfaitement normal, aucune anomalie radiologique et aucun antécédent familial.
Parmi les caractéristiques du syndrome des enfants battus, on retrouve :
- l'absence de traumatisme pouvant expliquer les fractures. Mais c'est également un critère en faveur de l'ostéogenèse imparfaite de tous types et cette notion n'oriente en rien le diagnostic différentiel.
Mais comme l'ostéogenèse imparfaite est beaucoup moins fréquente que les sévices sur enfants, il y a une tendance naturelle à écarter ce diagnostic lorsqu'un enfant présente des fractures multiples qui ne correspondent pas à l'importance des traumatismes allégués.
- l'existence de fractures d'âges différents. Ce signe se voit aussi dans l'ostéogénèse imparfaite.
Les fractures inexpliquées chez l'enfant sont caractéristiques aussi bien de l'ostéogenèse imparfaite que des blessures volontaires.
Un critère peut être utile chez certains patients souffrant d'ostéogenèse imparfaite : paradoxalement, les fractures peuvent être accompagnées de blessures extérieures visibles sur la peau moins importantes que ce qu'on pouvait théoriquement attendre si le squelette avait été normalement résistant.
Bien sûr, si l'enfant fracturé présente d'autres symptômes de sévices : hématomes ne correspondant pas à l'endroit de la fracture, traumatismes crâniens, hémorragies rétiniennes etc., le diagnostic d'ostéogenèse imparfaite est bien peu probable et l'analyse biochimique du collagène n'est pas utile.
L'examen radiologique est-il contributif?
Toutes les images radiologiques de fractures peuvent se voir dans les deux tableaux et aucune ne permet d'orienter le diagnostic de façon certaine.
Dans l'examen radiologique du squelette du nourrisson et de l'enfant, rien ne permet d'exclure le diagnostic d'ostéogenèse imparfaite.
Mise à part la forme de type II (où le diagnostic n'est jamais en question), les radiographies peuvent être tout à fait normales lors de la première année de vie, même chez des enfants qui développeront par la suite des signes évidents d'ostéogenèse imparfaite de type III ou IV.
Dans le type III classique, l'enfant présente souvent dès la naissance des fractures sévères des côtes et des os longs. Mais il ne s'agit pas d'un signe obligatoire.
Habituellement, le diagnostic de syndrome de Silverman se fait sur les signes radiologiques :
On estime très caractéristiques du syndrome de Silverman un certain nombre de critères radiologiques :
- fractures métaphysaires,
fractures spiroïdes du fémur ou de l'humérus, fractures bilatérales, fractures d'âge différent, fractures du crâne, lésions des doigts chez des nourrissons pas encore en âge de marcher.
La controverse la plus importante concerne les fractures métaphysaires sur un squelette normal. Même si celles-ci sont évocatrices de Silverman, elles ne sont absolument pas pathognomoniques et peuvent se voir aussi dans l'ostéogenèse imparfaite.
Certains médecins estiment que le type de fractures sur la radiographie peut aider au diagnostic. En fait, de nombreux auteurs ont démontré qu'il n'y a pas de types particuliers de fractures associés à l'ostéogenèse imparfaite. Tous les types de fractures peuvent se voir.
Les fractures métaphysaires peuvent survenir aussi bien avec que sans anomalie osseuse.
L'affirmation classique que ce type de fractures est virtuellement pathognomonique et spécifique d'un syndrome des enfants battus est une erreur.
Les fractures métaphysaires connaissent un grand nombre de causes. L'interprétation radiologique ne doit donc pas être considérée de façon isolée.
Les fractures métaphysaires au cours de la première année de la vie peuvent se voir dans un grand nombre de maladies osseuses, dès qu'il y a une anomalie dans la maturation du collagène : ostéogenèse imparfaite, hyperparathyroïdie, déficit en cuivre, syndrome de Menkes.
Les fractures métaphysaires sont également fréquentes en cas d'os déminéralisés chez les nourrissons souffrant de maladies neuromusculaires. Ce type de fractures a aussi été rapporté chez des enfants indemnes de toute maladie osseuse et chez qui un syndrome de Silverman a pu être éliminé, par exemple après un accouchement difficile par césarienne ou lors de manipulations dans une unité de soins intensifs.
Le signe radiologique majeur de l'ostéogenèse imparfaite est l'ostéopénie.
La plupart des patients porteurs d'ostéogenèse imparfaite de type III présentent très tôt une ostéopénie (transparence exagérée des os sur la radio) et d'autres anomalies radiologiques. Mais la plupart des patients avec une ostéogenèse imparfaite de type I ou de type IV ont des os qui paraissent de densité normale sur les radiographies standard. Pour beaucoup de patients atteints de forme modérée d'ostéogenèse imparfaite, l'ostéopénie est plutôt le résultat des fractures et de l'immobilisation nécessitée par le traitement. Dans les premières années de la vie, la densité osseuse est apparemment normale et même durant la vie adulte la densité osseuse peut paraître normale au niveau des os qui n'ont pas subi de fractures.
La morphométrie du métacarpe peut être normale chez l'adulte. Récemment, Paterson a utilisé une méthode moderne d'évaluation de la densité osseuse chez des adultes porteurs d'ostéogenèse imparfaite. La densité de l'extrémité distale du radius par absoptiométrie photonique était normale chez un bon nombre de sujets.
L'excès d'os wormiens est un bon argument diagnostique même s'il n'est pas pathognomonique d'ostéogenèse imparfaite. La plupart des patients avec la forme de type III ont un excès d'os wormiens. Mais dans les ostéogenèses imparfaites de type I et IV, ce signe est rarement présent.
Les autres éléments du diagnostic
Même si l'argument de fréquence joue en faveur du syndrome de Silverman (1 à 2% d'enfants battus dans la population générale dont 5 à 10% présentent des fractures), l'ostéogenèse imparfaite (1/20000 naissances) doit toujours être évoquée, surtout dans les cas qui paraissent atypiques.
L'absence de signe clinique ne permet pas d'orienter le diagnostic.
Un syndrome des enfants battus peut être réel sans signe extérieur visible le jour de l'examen (lésions cutanées, hématomes, griffures, plaies etc.).
Une ostéogenèse imparfaite peut exister sans signe clinique apparent. L'absence de sclérotique bleue n'est pas un argument permettant d'éliminer le diagnostic d'ostéogenèse imparfaite.
Dans ces cas difficiles, les seuls éléments probants sont :
- la répétition des examens radiologiques, l'enfant étant séparé de son milieu familial, afin de voir si de nouvelles fractures sont apparues;
Le diagnostic génétique est long et difficile.
Le Professeur Arnold Munnich affirmait lors des Journées Nationales de l'Association de l'ostéogenèse imparfaite que "la mutation pouvait être localisée pour 50% des personnes atteintes d'ostéogenèse imparfaite. Et il y a de bonnes raisons de penser que ce taux ne dépassera jamais 70 ou 80%".
Quels sont les autres diagnostics différentiels possibles ?
In utero et à la période néo-natale : Hypophosphatasie, achondrogenèse, nanisme thanatophore, dystrophie thoracique asphyxiante (maladie de Jeune), achondroplasie, dysplasie chondroectodermique, hyperostose corticale infantile de Caffey-Silvermann, syndrome de Cole Carpenter, nanisme campomélique.
Dans la petite enfance : Ostéoporose d'immobilisation, scorbut, dénutrition, maladie de Menkes, syphilis congénitale.
Pendant l'adolescence : Ostéoporose juvénile idiopathique, ostéosarcome, homocystinurie, dysplasie fibreuse, leucémies, syndrome de Cushing, maladie de Wilson.
[u]Quelles sont les implications psychologiques pour l'enfant ? [/u]
Il s'agit d'un enfant qui est amené aux urgences pour une fracture. La fracture quelle que soit la localisation est très douloureuse tant qu'elle n'est pas immobilisée.
Il s'agit rarement de la première fracture, le doute chez le personnel soignant n'intervient qu'en cas de récidive... Donc ce jeune enfant a une "mémoire" de la douleur.
Dans ce moment où il se sent particulièrement vulnérable, il est séparé de ses parents, de manière incompréhensible pour lui.
Il se sent abandonné par sa mère, sa famille, ses proches à un moment où il en a un besoin impératif. Ces enfants sont hospitalisés n'importe où, n'importe quand, ce qui génère souffrance et perte de ses repères. Comment l'enfant atteint d'ostéogenèse imparfaite placé puis rendu à ses parents peut-il vivre ses futures hospitalisations sinon comme une nouvelle séparation arbitraire d'avec ses parents ?
Le désir des membres de l'Association de l'ostéogénèse imparfaite, n'est pas de mettre en porte-à-faux les travailleurs chargés de la Protection pour l'Enfance, mais de faire en sorte qu'un « clignotant » s'installe à chaque fois que la maltraitance ne leur semble pas entièrement prouvée. Dans toutes ces situations qui posent problèmes une évaluation "psychosociale" doit être prévue avant tout placement de l'enfant. Si l'enfant est maltraité, il doit être protégé. S'il est atteint d'une des formes d'ostéogenèse imparfaite, il doit être soigné.
Souvent l'Association de l'ostéogénèse imparfaite est alertée par la famille et elle se trouve devant un mur d'incompréhension de la part des juges. En effet, le caractère rare de la maladie engendre une réelle méconnaissance de la part d'un orthopédiste hospitalier qui peut n'en avoir jamais vu et n'en avoir entendu parlé une seule fois lors de ses études en survol parmi des milliers d'autres maladies génétiques.
Arnold Munnich, Professeur dans le Centre de Génétique de l'Hôpital Necker-Enfants-Malades, dans son livre "La rage d'espérer", rapporte l'histoire de Tommy. Les parents viennent demander une analyse moléculaire qui seule à leurs yeux pourraient les laver de ces soupçons de maltraitance, en mettant en évidence la mutation chez leur fils. Or avec le seul examen clinique, confirmé par les radios que possèdent les parents le diagnostic aurait pu être fait. Les sclérotiques sont bleutées, on note une ostéoporose, la persistance d'os embryonnaires, les stigmates de fractures spontanées....
Quel est le traitement ?
L'ostéogenèse imparfaite est une maladie chronique qui dure toute la vie. Sa prise en charge régulière par le malade (aidé de sa famille pendant l'enfance) est le gage d'un pronostic fonctionnel le meilleur possible.
Le traitement repose sur la prise en charge des fractures : contention en bonne position, pas d'immobilisation trop prolongée qui aggrave l'ostéoporose, mobilisation précoce. En cas de fractures multiples, on doit parfois recourir à l'enclouage télescopique des os longs des membres inférieurs.
Trois nouvelles options thérapeutiques sont apparues : les biphosphonates, l'hormone de croissance et la transplantation médullaire (greffe de moelle à partir de donneurs HLA compatibles).